L’historique du projet de la réhabilitation de l’école Joliot-Curie, lancée en 2012, est un marqueur de la manière dont la majorité municipale gère ses grands projets d’investissements... Retour sur les différentes étapes du projet et sur la manière dont la ville communique, suit et gère ses projets.
Juin 2012 - Les origines de la restructuration
C’est lors du conseil du 28 juin 2012 que le projet de restructuration / extension de l’école Joliot-Curie apparaît.
Rendue nécessaire par l’afflux de nouveaux habitants et malgré une restructuration globale du groupe scolaire en 2002/2003, la restructuration du groupe scolaire Joliot-Curie est annoncée au conseil municipal du 28/6/2012.

Le programme prévoit ainsi :
- la restructuration et l’extension du groupe scolaire Joliot-Curie passant de 5 à 9 classes maternelles et de 9 à 15 classes élémentaires, avec un pôle tampon maternelle-élémentaire,
- un centre de loisirs maternel et élémentaire adapté aux besoins réactualisés, une zone de restauration scolaire agrandie.
A ce stade, les besoins et le programme ont été clairement identifiés par l’ensemble des parties prenantes : le programme ne devrait donc plus bouger.

L’échéancier prévisionnel de l’opération indique une livraison globale du
groupe scolaire restructuré et rénové pour la rentrée scolaire 2015. Comme le font remarquer les élus d’opposition en séance, il s’agit d’un planning ambitieux voire impossible mais la majorité persiste et raille son opposition.

A ce stade, le besoin et les délais sont donc parfaitement fixés. L’enveloppe financière est évaluée à 10,24 M€ incluant le coût des travaux (7,18 M€), tous les honoraires, les frais divers, les risques et les révisions de prix.

Mars 2013 - Les incertitudes apparaissent lors du vote du budget
Alors que la procédure de concours, lancée en août 2012, se poursuit lentement, un premier flou sur le montant de l’opération est soulevé lors du conseil municipal du 26 mars 2013.
Comme le montre l’autorisation de programme associée (voir ci dessous), le coût du programme est établi à 10,257 M€ Toutes Taxes Comprises (comme l’atteste la récupération de TVA, marquée FCTVA dans le tableau).

Curieusement, la ligne "Dépenses" ne semble comprendre que le coût des travaux alors que le coût des travaux votés est de 8,58 M€ TTC (7,18 M€ HT + 1,4M€ de taxes).
Trop importante pour être l’enveloppe de travaux voté, pas assez pour être l’enveloppe globale (avec les honoraires, les révisions..) mais que représente le montant de cette autorisation de programme ?
Juin 2013 - Concours de maîtrise d’œuvre
Alors que les budgets de la ville semblent s’égarer dans les chiffres, le concours de maîtrise d’œuvre remet les choses au point.
Le programme fourni aux candidats est très clair sur l’enveloppe des travaux comme en atteste cet extrait du programme :

La vérité sur les plannings apparaît face à des professionnels. L’« optimisme » de la majorité municipale s’efface : seule une partie de la restructuration doit être opérationnelle en 2015 ; le reste sera livré pour la rentrée 2016.

La majorité pouvait railler nos élus...
Le projet retenu (nom de code : PORTHOS) est sans conteste le meilleur des 3 proposés. Le budget sur lequel il s’engage est exactement celui de la ville, même si la commission technique le remet en question en l’estimant sous-dimensionné de 6% et estimant le projet à 7,6 M€.

La qualité du projet tient aussi à l’organisation très optimisée qu’il propose pour tenir les objectifs calendaires, pourtant déjà beaucoup moins ambitieux que les élus de la majorité ne l’auraient souhaité.
La ville a fixé des critères de sélection pour juger les projets. Le nombre de points alloués à chacun de ces critères permet de comprendre les enjeux de la ville :
- 30 points pour le parti architectural, urbain et paysager du projet.
- 20 points pour le respect du programme en matière de fonctionnalité, de surface et de qualité technique. Rappelons que le programme avait été jugé particulièrement complet lors du lancement du concours.
- 25 points pour l’économie du projet (coût d’investissement et d’exploitation). C’est le point faible du projet entre les craintes de dérive sur les coûts d’investissement de la commission technique déjà évoquées et la pauvreté de la réponse sur les coûts d’exploitation.

- 15 points pour le planning général et le phasage détaillé des opérations. Là le projet est très fort puisqu’il s’engage sur le planning et détaille précisément les phases... en espérant que ces délais seront tenus.
- 10 points pour la démarche et la qualité environnementale. Le projet est très vague mais on retiendra que le volet énergétique se veut très performant comme l’évoque la note de la commission technique.

Il s’agit de Marc FARCY qui connait bien la ville (et manifestement c’est réciproque) puisque il y a déjà construit les résidences dites du « dôme du Plessis », de « l’Hirondelle »… Il œuvre par exemple en 2014 pour un promoteur sur le terrain du diocèse (rue P. Rivet) pour la construction d’une nouvelle résidence mais il est surtout connu pour avoir réhabilité l’école Louis Hachette.
Juillet 2013 - Choix du maître d’œuvre
Le conseil municipal du 4 juillet avait pour objet, entre autres, de valider le choix du jury.
En préambule, le maire qualifie les travaux de Joliot-Curie comme "une urgence [qui] s’est imposée à nous".

La phrase est étrange... de quelle urgence parle-t-on ? Y a-t-il une urgence à découvrir que construire tant de logements dans la ZAC Cités-Jardins ne pouvait se faire sans adapter les équipements publics en général et les écoles en particulier ? Peut-être s’attendait-il à ce que les nouveaux habitants soient sans enfants ? Peut-être imaginait-il que seuls des retraités s’installeraient dans des appartements de type T3, T4 ou T5 ? Peu de choses sont prévisibles si ce n’est la démographie. Les études menées dès 2002 devaient conclure à la nécessité d’agrandir l’école Joliot-Curie face au nombre de nouveaux logements de la ZAC Cités-Jardins. S’il y avait urgence en 2013, à qui était-elle due ?
Le préambule de la délibération rappelle que l’enveloppe financière prévisionnelle votée en juin 2012 est fixée à 8 576 475 € HT (donc sans rapport avec la somme évoquée à l’époque, ni avec les autorisations de programme). Seul point fixe dans cette profusion de chiffres : le coût travaux qui reste à 7,18 M€ HT...

La rémunération de la maîtrise d’œuvre (architecte, bureau d’étude...) est fixé à 1 044 995, 99 € HT soit 11,5% du coût des travaux répartis comme suit :
- Mission de maîtrise d’œuvre : 825 941,85 € HT
- OPC (ordonnancement, pilotage, coordination) : 186 734, 68 € HT
- SSI (sécurité systèmes d’incendie) : 32 319, 46 € HT

Alors que le programme prévoit une livraison en 2016, alors que l’architecte prévoit une livraison en 2016, la ville continue à parler d’une livraison en 2015. B. MARQUAILLE alerte la majorité sur le côté irréaliste de ce planning... en vain !

Le maire évite et élude la question et maintient son planning. Un pari est lancé en séance... Histoire à suivre.
Septembre 2013 - Le maire continue à annoncer une livraison pour septembre 2015
A quelques mois des élections municipales, le maire semble n’avoir écouté ni l’architecte, ni ses services, ni même son opposition. Il annonce tranquillement aux parents (et donc électeurs) que l’école sera livrée totalement (29 classes) à la rentrée 2015 !

Octobre 2013 - Le projet avance plus vite que prévu et le coût reste « stable »
Lors du conseil du octobre 2013, la majorité est heureuse (à quelques mois des élections, on la comprend) d’annoncer que le projet est en avance et qu’il faut donc avancer les dépenses...
A quelques mois des élections municipales, qu’il est donc doux d’annoncer que les études de l’architecte sont en avance...

Malgré cet enthousiasme à régler l’architecte plus tôt que prévu, l’autorisation de programme maintient des crédits de paiement pour 2016... montrant par là même que la ville sait pertinemment que les travaux finiront au mieux en 2016.

Décembre 2013 - Pour plaire au département, l’objectif reste 2015 mais le prix des travaux augmente...
En décembre 2013, alors que rien n’a été dit en conseil municipal, le prix des travaux se confond avec l’enveloppe totale consacrée au projet mais, pour bien faire, la rentrée 2015 reste l’objectif.
Pour obtenir quelques subventions, faut-il gonfler l’addition pour en toucher plus ? Dans tous les cas, il semble de bon ton de maintenir l’objectif de 2015.

Avril 2014 - Pas d’augmentation de coût vue du conseil mais le projet dérive vers 2017
Lors du conseil municipal du 10 avril 2014, l’autorisation de programme montre que finalement l’architecte n’a finalement pas pris tant d’avance que cela mais surtout que les délais ne seront pas tenus
L’autorisation de programme soumis au vote montre plusieurs éléments :
- l’architecte n’a pas pu finir son avant-projet : la preuve, le budget annoncé en octobre n’est finalement pas consommé ;
- le projet prend du retard puisqu’alors que les premiers travaux devaient commencer en avril, les procédures de choix des entreprises ne sont pas lancées ;
- le projet ne sera pas terminé en 2015 puisque la majeure partie de la somme consacrée aux travaux en 2014 sont décalés en 2015 voire en 2016 ;

C’est le sens des questions posées par notre élu lors de ce conseil municipal :

Ne sachant (ou ne voulant) pas répondre aux questions de notre élu, le maire laisse répondre son Directeur Général des Services qui s’égare un peu annonçant un lancement des travaux fin 2015 alors qu’il voulait sans doute dire fin 2014 (ce qui représente déjà près de 9 mois de retard).

Le 14 avril, soit quelques jours après le conseil, l’architecte remet enfin son Avant Projet Définitif...

A le lire, on comprend que la maîtrise d’œuvre ait finalement mis tant de temps à le sortir mais comment imaginer que le maire ou le DGS n’étaient pas au courant de son contenu alors qu’ils répondaient aux questions de nos élus ? Retards, dérives financières...
Juin 2014 - un coût qui augmente de +32% et une livraison pour 2017
Lors du conseil du 26 juin 2014, l’addition est salée... Un coût travaux qui augmente de 32% et une livraison annoncée entre 2016 et 2018 !
Et voilà l’APD (avant-projet détaillé) d’avril 2014 qui révèle ses secrets

Analysons les justifications une à une :
- une augmentation de surface pour 349 k€ dont une partie serait liée à la concertation, pourtant la ville était fière de rappeler en 2012 que la concertation avait été complète et que tous les besoins étaient recensés. L’autre partie concernerait l’accessibilité dont la délibération rappelle qu’elle est "réglementaire" : la loi datant de 2007, elle était connue tant par les rédacteurs du programme que par l’architecte lors de la remise de son projet au concours.
- un surcoût de 260 k€ liée à l’isolation thermique par l’extérieur. Pourtant, le dossier de la commission indiquait qu’une forte isolation était déjà prévue. C’était même un des points forts du projet.
- un surcoût de 126 k€ pour installer un bassin de rétention d’eau, mais les contraintes réglementaires n’ont pas évoluées depuis de nombreuses années. Le département impose un débit de fuite de 2 l/s/ha depuis des années, le PLU n’a pas (encore) changé sur ce sujet… Ces éléments étaient connus des rédacteurs du programme comme de l’architecte dès la remise du concours.
- un surcoût de 332 k€ parce que finalement l’architecte se rend compte que c’est compliqué, qu’il ne pourra pas faire comme il voulait. Pourtant l’architecte a visité au moins deux fois l’école, il avait à disposition le résultat d’audits et puis, quand même, la dernière réhabilitation de l’école n’est pas si vieille…
- un surcoût de 1,04 M€ pour un passage en entreprise générale. Les justifications apportées par l’architecte sont un réquisitoire contre la ville puisqu’il indique l’impossibilité de mener le chantier en lots séparés : trop risqué, trop compliqué... Pourquoi la ville ne l’a-t-elle pas anticipée ? Pourquoi l’architecte n’en n’a-t-il pas parlé lors du concours ? 1 M€ (soit 15% du marché) simplement pour coordonner un chantier alors que l’entreprise générale va ainsi emporter un gros marché ? Les professionnels retiennent entre 4 et 7 %... à croire qu’au Plessis-Robinson, on ne fait rien comme ailleurs...
Compte tenu de l’avancement de l’opération, il est à parier que les travaux ne commenceront au mieux qu’en janvier 2015 (il faut le temps de figer les dossiers de consultation, de lancer l’appel d’offre et de sélectionner les entreprises). Or la délibération ajuste les plannings :

La livraison interviendrait donc, selon les propres dires de la majorité municipale pour partie en janvier 2016 et pour le reste en janvier 2018. Et dire que cette même majorité raillait nos élus lorsqu’ils remettaient en cause la faisabilité d’une livraison en 2015.